Introduction : Quand un simple tour de cheville ne vous permet pas d’avancer
Neuf entorses latérales de la cheville sur dix se sentent mieux en six semaines, mais près de 40 % des patients signalent une douleur tenace ou une instabilité pendant des années. Les suspects habituels – ligaments lâches, tension du tendon péronier, arthrite précoce – retiennent beaucoup d’attention. Un petit espace, cependant, manque sur la radiographie initiale et même sur la première IRM : le sinus tarsi, un tunnel en forme d’entonnoir entre le talus et le calcanéum. L’inflammation ou le tissu cicatriciel provoque ici le syndrome sinus-tarsi (STS), une maladie si sous-diagnostiquée que de nombreux athlètes trébuchent de clinique en clinique avant même que quiconque ne palpe la zone. Cette analyse approfondie vous aidera (ou aidera vos patients) à détecter précocement le syndrome du sinus-tarsi, à rechercher un traitement ciblé et enfin à éliminer cette claudication compensatoire.
1. Sinus Tarsi 101 : Micro-anatomie avec conséquences macro
Le sinus tarsi – du latin « creux de la cheville » – est une cavité en forme de cône située à l’extérieur (côté latéral) de l’arrière-pied. Il se trouve juste devant le péroné, coincé entre le talus en haut et le calcanéum en dessous. Emballés dans un espace pas plus large que votre petit doigt se trouvent :
- Ligaments interosseux talocalcanéens et cervicaux (clés stabilisateurs sous-taliens)
- Coussinet adipeux et plexus veineux (absorption des chocs)
- Nerfs sensoriels qui détectent les changements subtils dans la position du pied
Une entorse d’inversion soudaine peut coincer ces tissus, provoquant des micro-saignements, des ecchymoses au niveau des coussinets adipeux et un effilochage des ligaments. Le tissu cicatriciel qui suit agit comme du papier bulle coincé dans une charnière : chaque pas pince, en particulier sur un sol inégal.(1)
2. Comment une entorse de routine se transforme en syndrome sinus-tarsi
Phase 1 – Traumatisme initial :Le pied roule vers l’intérieur. Le ligament talofibulaire antérieur (ATFL) se déchire ; les os du talon heurtent, comprimant le contenu du sinus tarsi.
Phase 2 – « Guéri » mais hypersensible :L’enflure diminue, mais le tissu de granulation et la synovite persistent dans le tunnel.
Phase 3 – Chaos proprioceptif :Les terminaisons nerveuses endommagées indiquent mal la position de l’articulation, ce qui entraîne des oscillations et des mini-entorses répétées. Chaque micro-traumatisme relance la boucle inflammatoire.(2)
Étant donné que les IRM standard de la cheville se concentrent souvent sur l’articulation tibio-talienne, de subtiles modifications des tissus mous du sinus et du tarse sont ignorées. À moins que le radiologue ne recherche spécifiquement un œdème du coussinet adipeux ou une effilochage ligamentaire au niveau de l’articulation sous-talienne, le rapport peut revenir « normal ».
3. Signes classiques que vous avez affaire à STS
- Douleur ponctuelle :Deux travers de doigt devant l’os externe de la cheville (malléole latérale). Appuyer ici reproduit une douleur profonde et aiguë.
- Sensation « lâche dans le sable »en marchant sur l’herbe ou le gravier, provoquée par une instabilité sous-talienne.
- Pronation douloureuse :Douleur du pied roulant vers l’intérieur des rampes ; marcher sur la pointe des pieds (supination) se sent souvent mieux.
- Raideur matinale 50 % pendant au moins 30 minutes équivaut à un diagnostic. L’association d’un dépôt-stéroïde procure souvent des semaines de soulagement et confirme le potentiel thérapeutique.(3)
6. Feuille de route du traitement : des simples solutions à la chirurgie
6.1 Phase I : Calmer le feu (semaines 0–4)
- Décharger et protéger :Orthèse à lacets semi-rigide ou attelle d’étrier pour limiter l’inversion/éversion.
- Stratégies anti-inflammatoires :AINS (7 à 10 jours max), bains de contraste, diclofénac topique.
- Modification d’activité :Collines de fossé et sentiers inégaux ; remplacez la course par du vélo ou du jogging en piscine.
- Thérapie manuelle :De douces mobilisations sous-talaires rétablissent la glisse sans stresser les ligaments.
6.2 Phase II : Restaurer la stabilité et la proprioception (semaines 4 à 8)
- Exercices d’inversion/éversion Theraband : 3 séries de 15 par jour.
- Équilibre sur une jambe sur coussin en mousse ; progressez les yeux fermés, puis au bal Bosu.
- Exercices de pieds courts pour renforcer les muscles plantaires intrinsèques, réduisant ainsi la pronation excessive.
Un ECR de 2023 a montré une baisse de la douleur de l’EVA de 55 % et une réduction des erreurs d’équilibre de 30 % après six semaines de réadaptation proprioceptive ciblée chez les patients atteints du syndrome sinusal-tarsi chronique.(4)
6.3 Phase III : Interventions guidées par l’image (si la douleur persiste)
- Injection de corticostéroïdes-lidocaïne :En première ligne lorsque la rééducation s’arrête. Dure 6 à 12 semaines dans 70 % des cas.
- Plasma riche en plaquettes (PRP) :Option émergente ; de petites études rapportent un soulagement à long terme de 60 % en favorisant la cicatrisation ligamentaire.
- Ablation par radiofréquence (RFA) :Pour les douleurs neuropathiques réfractaires ; dénature les fibres nerveuses nociceptives à l’intérieur du sinus tarsi.
6.4 Phase IV : Arthroscopie ou débridement ouvert
- Si douleur ≥ 6 mois malgré deux injections et une rééducation complète, envisager une intervention chirurgicale. L’arthroscopie sous-talienne à travers deux portes de 4 mm élimine le tissu cicatriciel, répare le ligament cervical et traite les lésions ostéochondrales occultes. Les taux de réussite oscillent autour de 80 à 90 % pour reprendre le sport d’avant la blessure dans les six mois.(5)
7. Aide-mémoire pour les soins personnels et la prévention à domicile
- Technique de verrouillage des lacets pour sécuriser le talon et réduire les mouvements excessifs du milieu du pied.
- Ruban adhésif à faible teneur en colorant le jour du match pour limiter la pronation et décharger le sinus tarsi.
- Remplacez les chaussures usées tous les 300 à 400 milles ; vérifiez s’il y a une rupture du bord latéral.
- Règle de progression du terrain : trottoir plat ➔ herbe ➔ sentier, avançant uniquement lorsque 100 % sans douleur.
- Étirements nocturnes des mollets et des péroniers : 3 × 30 s chacun pour réduire la traction sur l’articulation sous-talienne.
8. Foire aux questions (réponses adaptées aux patients)
Q : Mon IRM était « normale ». Puis-je quand même avoir le syndrome sinus tarsi ?Oui. Une légère synovite ou de minuscules déchirures ligamentaires peuvent passer en dessous de la résolution des séquences standard. Une injection diagnostique est souvent plus révélatrice qu’un scanner.
Q : Aurai-je besoin d’une intervention chirurgicale ?Environ un cas chronique sur dix évolue vers une arthroscopie. La plupart résolvent avec une double dose de rééducation proprioceptive plus une injection de stéroïdes ou de PRP bien placée.
Q : Est-il acceptable de continuer à courir si la douleur est légère ?Un inconfort de faible intensité (
